Orthoptie pour les nuls
Pour un public non initié, le strabisme est un désagrément esthétique qui doit être corrigé. Or le strabisme non traité entraîne généralement des conséquences graves pour la vision.
La vision se développe chez le tout jeune enfant sous l’influence de stimulations sensorielles telles que la lumière, les formes, les visages. Des modifications anatomiques s’opèrent au niveau de la rétine vers l’âge de 4 mois de vie et le bébé va apprendre à aligner ses deux yeux pour filmer son environnement, découvrir son corps et les interactions de ce dernier avec l’écosystème qui l’entoure. Ces relations qui s’établissent entre les yeux et le cerveau du jeune enfant sont l’ébauche de la vision binoculaire. Elle permet aux individus dont les yeux sont parallèles, de réceptionner et de traiter les deux images identiques et de les modéliser en une seule, tridimensionnelle.
La période critique du développement de la vision binoculaire se situe donc entre 4 et 18 mois de vie.
Les adultes ayant développé une vision dite binoculaire, et qui pour différentes causes ( AVC, diabète, myasthénie, traumatismes oculomoteurs divers…), développent un strabisme ont pour la plupart une vision double car le cerveau est alors incapable de superposer les images de chaque œil.
Chez l’enfant, lorsque les deux yeux ne sont pas parallèles, le système visuel étant encore malléable, le cerveau peut choisir d’ignorer les informations fournies par l’œil dévié, qui peut alors finir par perdre toute capacité de vision, l’œil sera alors amblyope.
L’amblyopie touche une grande majorité des enfants atteints de strabisme, mais elle pourra être rééduquée et corrigée pour la majorité d’entre eux. La clé du succès, repose sur la précocité du diagnostic et donc la précocité de la prise en soins, avant 4 ans. L’existence d’antécédents familiaux, les facteurs optiques et la prématurité sont des causes fréquentes d’apparition de strabisme.
Il existe plusieurs sortes de strabisme, le strabisme convergent (l’œil est dévié vers le nez) , le strabisme divergent ( l’œil est dévié vers l’oreille , les strabismes verticaux ( l’œil est dévié vers le haut ou le bas).
Le port constant des lunettes correctrices adéquates est élémentaire dans le traitement du strabisme et dans la prévention de l’amblyopie. Selon le type de strabisme, la rééducation orthoptique peut diminuer ou favoriser la compensation de ce dernier.
Le bilan orthoptique préopératoire est indispensable dans le projet chirurgical strabique de l’enfant ou de l’adulte. Le diagnostic orthoptique qui en découle argumente l’indication, le moment et le protocole opératoire du chirurgien strabologue.
Pour traiter la perte de vision de l’œil amblyope, il faudra occlure le bon œil par pansement oculaire pour stimuler l’œil mal voyant. La durée quotidienne d’occlusion du bon œil sera ajustée au cas par cas, elle dépendra du strabisme, de la perte de vision et du développement de l’enfant.
Les séquelles d’une amblyopie ou d’un strabisme non rééduqués auront des conséquences sur les activités de la vie courante, tels que les apprentissages, la conduite, et sur la posture , la stabilité dans l’espace .
La vision et le regard sont une fonction primordiale. Elle est le pont entre l’être humain et son milieu.
Il y a perception visuelle dans toute activité de la vie.
C’est grâce à elle que l’enfant en plein développement apprend à reconnaître ce qui l’entoure: objets, personnes.
A l’école, la perception visuelle va participer à l’apprentissage de la lecture, de l’écriture, du nombre et des mathématiques. Toutes ces tâches en partie visuelles sont perçues avec plus ou moins d’efficacité et selon la maturité des capacités de l’enfant.
Un enfant qui présente des troubles neurovisuels est véritablement handicapé.
Il éprouve des difficultés à reconnaître, à mettre en place des relations spatiales et l’apprentissage scolaire s’en trouve plus complexe.
Il peut, alors, en résulter des troubles du comportement.
L’orthoptiste permet après un bilan NEURO VISUEL de connaître mieux la nature des déficiences et de mettre au point un protocole adapté après un diagnostic orthoptique.Il est un rééducateur qui a la compétence et l’expertise de connaître et de différencier les différents processus de la fonction visuelle et de pouvoir la stimuler.
La rééducation orthoptique NEUROVISUELLE faisant appel à des stimulations visuelles va permettre de développer des capacités qui pourront accélérer les possibilités d’apprentissages et de progrès dans les autres prises en charge.
Les compétences de perception visuelle représentent la capacité du cerveau à absorber et à donner un sens à ce que nous voyons avec notre tandem visuel : deux yeux.
La perception visuelle est nécessaire pour que les processus cognitifs existent et se développent.
Les compétences de perception visuelle impliquent sept composants:
Discrimination visuelle : un enfant doit percevoir les différences ou les similitudes entre les objets et toute modification d’un élément quelque soit le fond plus ou moins chargé.
La discrimination permet la Constance de forme. Cette compétence représente la capacité de reconnaître que deux objets sont identiques même s’ils sont dans différentes positions, couleurs ou tailles… différentes.
La discrimination permet aussi la Closure : capacité à reconnaître deux objets qui sont identiques même si une partie de l’un est manquante ou si un objet est incomplet.
Visuo spatial dont relations visuelles-spatiales : capacité à différencier la place d’un élément par rapport à un autre.
Par exemple, les préoccupations visuo-spatiales impliquent la capacité de faire la distinction entre les lettres b et d ou p et q (en comprenant que la lettre n’est pas seulement dans une position différente, mais que c’est une lettre différente).
Mémoire visuelle : capacité de se souvenir des informations visuelles et de les stocker dans la mémoire à court terme. Un enfant ayant des difficultés de mémoire visuelle aura du mal à mémoriser des faits et à comprendre le sens du texte qu’il lit (compréhension en lecture).
Mémoire séquentielle : capacité de se souvenir d’une série de formes et de la reconnaître parmi d’autres formes. Par exemple, la mémoire séquentielle est la capacité d’un enfant à voir les mots dans leur ensemble lors de la copie des phrases du tableau.
Ces capacités sont au cœur de la lecture, l’écriture et de l’orthographe.
La coordination œil/main : les capacités de perception visuelle sont étroitement liées à la motricité : nos compétences visuelles et motrices nous permettent de coordonner nos yeux et nos mains pour écrire, par exemple.
L’orthoptiste peut être amené à réaliser des bilans et des prises en soin basse vision. Le cadre de la basse vision est règlementé en France. En effet, est considérée comme relevant de la basse vision toute personne présentant une acuité visuelle* inférieure à 4/10 ou un champ visuel* inférieur à 20° (*pour la définition de ces deux notions, vous pouvez vous référer au lexique orthoptique) sur son meilleur œil, avec la meilleure correction possible. Selon l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), le seuil de la basse vision est de 3/10.
Les personnes relevant de la basse vision ne sont donc pas complètement corrigées par leur aide optique si elles en disposent. Le rôle de l’orthoptiste dans ce cadre-là sera d’établir en premier lieu un bilan sensori-moteur et fonctionnel. Celui-ci pourra préciser plusieurs axes :
–Qu’est-ce-que le patient voit ?
Par exemple, quelle est son acuité visuelle, son champ de vision, voit-il les couleurs ?…
-Comment ses yeux se meuvent et se coordonnent ou non ?
Ainsi, le patient dispose-t-il de deux yeux fonctionnels ? Peut-il fixer ? Comment ?…
-Comment le patient utilise son potentiel visuel résiduel ?
Suite aux constats réalisés sur les deux premiers axes, l’orthoptiste évalue comment le patient utilise son potentiel visuel fonctionnellement, dans différentes tâches faisant écho à ce qu’il vit dans son quotidien.
En rééducation, le rôle de l’orthoptiste ne sera pas de « rendre la vue » au patient. Cependant, en l’aidant à mieux optimiser son potentiel visuel résiduel, celui-ci pourra gagner en confort et en aisance dans les différentes tâches nécessitant l’utilisation de sa vision.
Cette prise en soin part des besoins du patients exprimés et recherchés durant l’anamnèse du bilan, lorsque l’orthoptiste demandera quel(s) domaine(s) est (sont) impacté(s) par la perte de vision. Il s’agit alors de réaliser une rééducation personnalisée et adaptée à la demande formulée.
Un autre axe du bilan basse vision sera d’établir le besoin en aide optique, en matériel adapté et en éclairage, et ce, potentiellement en lien avec d’autres professionnels de santé (ergothérapeute, opticien, instructeur en locomotion…).
Le bilan et la prise en soin basse vision de l’orthoptiste figure dans son décret de compétence et l’amène à intervenir auprès d’un public large sans limite d’âge. Chez les plus jeunes, c’est le projet de soin des parents ou personnes ayant l’autorité parentale qui sera prise en compte ainsi que la parole de l’enfant dès qu’il sera en mesure de l’exprimer.
Les orthoptistes réalisent sur prescriptions médicales des examens complémentaires d’explorations fonctionnelles nécessaires dans certaines pathologies oculaires.
Certains examens peuvent être réalisés en libéral, dans un établissement ou au sein de cabinet d’ophtalmologie et dans ce cas ils sont réalisés en amont de la consultation ophtalmologique.
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Consulter RNO (protocole de délégation de tâche pour le Renouvellement d’Optique) – pdf
Vertiges et sensations pseudo-ébrieuses sont des symptômes classiques d’un trouble vestibulaire, périphérique ou central.
Dans la vie de tous les jours, nous utilisons nos yeux quand nous sommes en mouvement et sans cesse nous déplaçons notre regard d’un endroit vers un autre. Pour stabiliser la vision alors que nous marchons ou que nous bougeons la tête, il est important que des mécanismes de coordination œil/tête entrent en jeu, qu’un système régulateur assure la stabilisation de l’image sur la rétine en toute circonstance et qu’un système de pilotage du regard organise la ré-orientation des axes visuels en fonction des mouvements de la tête dans l’espace. C’est à ce niveau qu’intervient le système vestibulaire. Il constitue un ensemble de circuiteries neuronales complexes qui, par le biais de l’oreille interne et du réflexe vestibulo-oculaire (RVO), entretient des liens très étroits avec le système visuel jusqu’à son plus haut niveau de perception.
Dans ce contexte, la « rééducation vestibulo-visuelle » sera le traitement fonctionnel de premier choix pour remédier aux « pannes » de ce système ; elle devra être confiée à l’orthoptiste. Grâce à la plasticité neuronale et aux mécanismes de compensation centrale, les anomalies vont être effacées et la stabilisation de l’image (stabilisation du regard) va pouvoir être rétablie et optimisée. Les éventuelles stratégies d’équilibration inadéquates résiduelles seront corrigées. La perception du corps dans son espace sera rendue cohérente et harmonieuse.
La revalidation vestibulaire est un traitement fonctionnel destiné aux patients qui sont atteints d’un trouble « vestibulaire » au sens large du terme.
Ainsi, l’orthoptiste pourra aider les patients souffrant d’affections telles que la maladie de Ménière, la névrite vestibulaire, ou tout autre trouble siégeant à l’un ou l’autre niveau de la chaîne de stabilisation et/ou de pilotage du regard dont les conséquences seront essentiellement visuelles.
La posturologie est une discipline qui permet d’étudier les relations des différents capteurs sensoriels ( oeil, vestibule ou oreille interne, proprioception par l’étude du capteur podal, occlusion dentaire, kinésithérapie / ostéopathie…) entre eux déterminer le rôle et l’incidence de chacun d’entre eux et les rapports qu’ils entretiennent.
La posturologie est une spécialité multidisciplinaire où chaque professionnel de santé intervient dans son champ de compétence mais le langage, les mesures objectives, les tests cliniques sont communs.
Le rôle de l’orthoptiste sera de mettre en évidence l’origine du défaut visuel ( insuffisance de convergence, de divergence….) et le choix du traitement proposé.
Le bilan orthoptique pourra être demandé par un autre professionnel de santé ou bien l’orthoptiste pourra adresser le patient à une autre thérapeute s’il estime qu’un autre capteur sensoriel est en cause dans la plainte visuelle du patient.
Recourir à un bilan posturologique revient à considérer le patient, ses symptômes dans sa globalité.
ORTHOPTIE ET DEPISTAGE PRECOCE DES TROUBLES VISUELS CHEZ LES 0- 3 ANS
Une bonne vision est indispensable pour le développement harmonieux de votre enfant.
La vision se développe dans les toutes premières années de la vie. C’est la raison pour laquelle, plus un trouble visuel est dépisté tôt, plus les chances de récupération de l’enfant sont grandes.
L’orthoptiste, professionnel de la vision, est en mesure de dépister dès le plus jeune âge :
- Un strabisme (déviation d’un œil vers la droite ou la gauche, vers le haut ou le bas),
- Une différence de vision entre les deux yeux (amblyopie),
- Un défaut optique (besoin de lunettes),
- Une paralysie d’un muscle oculaire.
Soyez vigilants dans les cas d’antécédents familiaux (parents, grands-parents, frères et sœurs, cousins…), de strabisme, de port de lunettes avant l’âge de 10- 12 ans, de vision plus faible d’un œil (amblyopie), d’une consanguinité, d’une grossesse pathologique (toxoplasmose…), de consommation d’alcool, tabac, drogue pendant la grossesse, d’un accouchement long et difficile, de prématurité, de souffrance cérébrale, de réanimation, de petit poids de naissance (inférieur à 1500g)
Les signes qui doivent vous inciter à consulter :
- Dès les premières semaines, l’absence de clignement à la lumière,
- Après 4 mois, votre enfant ne suit pas un objet qui se déplace lentement devant ses yeux (à 20 cm), il ne vous regarde pas, il ne sourit pas, il présente un strabisme permanent,
- Après 9 mois, il n’attrape pas les objets (doudou, biberon, jouets…), sa tête est inclinée en permanence (torticolis), il présente un strabisme intermittent ou permanent.
- Après l’acquisition de la marche, il se cogne et tombe souvent, il plisse des yeux, cligne et/ou ferme un œil au soleil,
- Entre 2 et 3 ans, il ne regarde pas les livres, les images, il ne s’intéresse pas aux jeux.